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Bonjour,
Vous allez écouter une interview de Benoît Marie dans laquelle il nous parle entre autres de sécurité en mer, il nous donne sa méthode pour choisir quel matériel embarquer en longue navigation ainsi que des astuces pour le routage météo. Ce skipper professionnel nous dévoile également comment il en est arrivé aujourd’hui à concevoir des prototypes de bateaux sur foils.
Mary & Anto :
Nous recevons aujourd’hui Benoît Marie, vainqueur de la mini transat en 2013 à la fois navigateur ingénieur et conférencier il s’est spécialisé depuis dans les bateaux sur foils. Vous pouvez le retrouver sur le site benoitmarie.com.
Bonjour Benoît, donc pour commencer est-ce que tu peux nous parler un peu de toi, comment tu en es arrivé là ?
Benoît Marie :
Bonjour, effectivement moi j’ai un parcours d’ingénieur, j’ai commencé l’optimist comme pas mal d’enfants quand j’avais sept ans, avec des parents qui m’ont fortement incité à faire de la voile puisque c’était leur passion respective.
Un de mes premiers souvenirs d’enfance c’étaient sur le bateau de nos voisins, on habitait en région parisienne à l’époque, et les premiers souvenirs d’enfant que j’ai, c’est les nuits en mer avec mes parents sur ce petit bateau en bois. C’était un chassiron qui s’appelait Andromède.
Ce qui est rigolo c’est que ce bateau-là appartenait à la famille Viat, dont le fils Louis est aussi dans le milieu de la voile professionnelle, c’est assez rigolo de s’être retrouvé vingt ans plus tard.
Donc j’ai fait de l’optimist en compétition, enfin d’abord en école de voile puis en compétition, puis j’ai fait des études d’ingénieur pour me spécialiser dans la voile de compétition.
Donc j’ai toujours rêvé de faire de la course au large et de faire la mini transat qui est le point de départ de pas mal de carrières professionnelles.
Et c’est ce que j’ai fait en 2013 après deux ans de projet, et ça s’est bien passé puisque je l’ai gagné du premier coup, et c’est ce qui a lancé ma carrière sportive que je poursuis depuis sur des bateaux à foils de toutes tailles.
Mary & Anto :
Ok, et qu’est-ce qui te plaît le plus en ce travail ?
Benoît Marie :
Ce qui me plaît le plus c’est différent choses, moi je suis un technicien donc moi ce qui me plaît vraiment c’est la technique : faire avancer les bateaux le plus vite possible, réfléchir à leurs améliorations, comment trouver de petites innovations, des petites améliorations un peu partout que ce soit en aéro, en hydro, en structure, en système, en tout ce qu’on veut.
Donc c’est vraiment le technique qui me plaît bien sur les bateaux de haute performance .
Et puis une autre facette que j’aime énormément, c’est ces voyages, qu’on n’est pas obligé de faire qu’en courses, mais que je trouve sympa de voyager. Les courses aux larges on rejoint un autre continent un autre pays une autre culture et pour moi c’est toujours magique, qu’on le fasse en croisière d’ailleurs, ou en compétition c’est la même chose.
Et puis sur les circuits internationaux, c’est un peu pareil même si on prend la voiture ou l’avion. Ça reste une confrontation des cultures différentes auprès de personnes qui viennent de plein d’autres endroits sur la planète. Un autre truc que j’aime vraiment c’est la gestion de l’équipage et les interactions sociales et humaines en mer. Je trouve que c’est super sympa ce qu’on peut vivre en mer. Ce sont des moments très forts, voilà !
Mary & Anto :
Alors tu es vainqueur de la mini transat de 2013, tu as donc traversé l’Atlantique en solitaire sur un bateau de 6,50 m en 18 jours, comment est-ce que tu as fait pour tout gérer seul à bord ?
Benoît Marie :
Alors ce qu’il faut dire en fait, c’est qu’effectivement ce sont 18 jours tout seul sur l’Atlantique en course, mais c’est surtout deux ans de projets pendant lequel on prépare cette traversée. On ne se lance pas du jour au lendemain, on a deux ans pour la préparer on y va par étapes.
La première étape c’était de naviguer pendant la journée avec au moins une personne avec moi pour m’aider à gérer, puis de nuit en double, puis des courses de différentes tailles, puis une petite sortie en solitaire puis une longue sortie en solitaire, puis un parcours de qualification de 1000milles en solitaire, puis un aller-retour aux Açores en course et en solitaire.
Et puis un an plus tard, au bout de la deuxième année, finalement, cette traversé l’Atlantique !
Donc en fait, ce qu’il faut bien voir ce que c’est quand même deux ans d’apprentissage qui mène à cette grande traversée, et du coup sur ces deux ans on a le temps de se poser des questions. Les bonnes questions de faire les erreurs ou d’éviter de faire des erreurs, enfin bon bref d’apprendre pour être prêt deux ans plus tard, à traverser l’Atlantique en solitaire sur un petit bateau.
C’est deux ans de préparations qui sont hyper importantes, parce que la caractéristique de la mini c’est qu’on n’a pas communication, il n’y a pas de téléphone, pas l’ordinateur, pas d’internet, il n’y a rien. Donc on peut juste communiquer via la VHF avec les bateaux qui sont autour dans un rayon de quelques milles et ben y’en a pas beaucoup quand même au milieu de l’atlantique !
Surtout que mon année [de la mini] on était un peut échappés avec le vent [il était loin devant tout le monde] donc j’étais vraiment en contact avec personne pendant quasiment toute la traversée.
Mais voilà, après c’est de la préparation, savoir où sont les limites du bateau, mes limites personnelles, savoir quand dormir, avoir préparé le parcours, la météo, le bateau avoir emmené tout pour réparer et à la fois pas trop pour pas être trop lourd, avoir préparé la nourriture qui nous plaît, savoir dormir par tranche de 10 à 20 minutes, gérer son sommeil…
Il y a énormément de choses à apprendre et c’est vraiment au bout de deux ans que moi, je me suis senti à l’aise avec ce projet. Et puis j’ai fait ce saut dans l’inconnu qu’était cette transat, et voilà c’était un moment très très fort et j’en garde un excellent souvenir, même si c’était pas toujours facile ça reste un des moments forts de ma vie.
Mary & Anto :
Donc par exemple, pour les quarts de nuit tu t’étais préparé avant le départ à réguler ton sommeil, ce genre de choses ?
Benoît Marie :
Ouais alors moi j’ai toujours voulu faire la mini transat depuis que j’ai 11 ans et du coup j’étais un peu timbré comme dirait ma sœur… Etant gamin je voulais préparer la mini et donc j’imaginais que j’étais sur un bateau, je dormais fenêtre ouverte, volet ouvert un peu n’importe quand tous les jours de l’année, pour apprendre a dormir avec la lumière, avec le bruit et d’arriver à être un peu plus maître de mon sommeil qu’avant. Donc du coup j’avais cette aptitude à pouvoir un peu dormir n’importe quand n’importe comment.
Et puis j’étais suivi, j’ai fait des formations avec des spécialistes du sommeil afin de me connaître personnellement, reconnaître les moments qui sont propices au repos, connaître les signes de ce que l’on appelle « les portes de sommeil » qui nous font entrer directement dans le sommeil profond donc de gagner un peut de temps de repos tout en restant éveillé. Et puis après ben il y a un tout ce qui est organisation pour gérer son énergie, ça c’est toutes les courses de préparation et voilà c’est deux ans de projet.
Mary & Anto :
Oui c’est vrai que du coup ça fait donc vraiment beaucoup de préparation c’est intéressant…
Benoît Marie :
A ouais ouais ouais, c’était deux ans de préparation à temps plein de moi-même. Et puis j’étais entouré de spécialistes, donc les spécialistes techniques pour la préparation du bateau, j’étais hébergé par la structure qui gérait les projets de Jean-Pierre Dick, qui s’appelle Absolute Dreamer.
Et donc les techniciens venaient me voir, j’allais leur poser des questions techniques sur le bateau, des questions d’avitaillement, d’assurance, de toutes les choses qui peuvent se passer, j’avais un entraîneur aussi, j’avais quatre experts météo pendant la transat qui m’ont donné des debrif avant le départ.
Ya un truc qui m’a vachement aidé aussi c’est que je suis allé poser cette question a pas mal de gens qui sont passés par la mini transat avant moi, qui était “qu’est ce que tu retiens de la transat qu’est-ce que tu referais pareil ou au contraire ne referais pas pareil” et ça, c’était super intéressant d’avoir cette démarche parce qu’en fait c’était une manière d’acquérir l’expérience que je n’avais pas, et c’est je pense, ce qui m’a permis d’avoir ce beau résultat, enfin même ce résultat incroyable et du premier coup !
Mary & Anto :
Oui c’est sur que c’est un résultat incroyable pour une première course en effet, enfin une première grande course…
Benoît Marie :
Youhou, j’en reviens toujours pas !
Mary & Anto :
Et du coup toi tu es entouré de toute une équipe quand tu prépares ton voyage. Qu’est-ce que… si on parle de la sécurité à bord, nous ceux qui nous suivent ce sont souvent des familles qui préparent un voyage certes en croisière, mais qui sont… qui se préoccupent beaucoup de leur sécurité en mer.
Et vous donc quel type de matériel de sécurité vous embarquez en courses et qu’est-ce qui d’après toi pourrait être adapté aussi en croisière ?
Benoît Marie :
Là c’est une très bonne question, effectivement on a les mêmes problématiques quand on est en course en équipage en solitaire ou en croisière, le but il est exactement le même. La finalité de l’expérience ce n’est pas de gagner la course, c’est d’abord d’arriver en vie de l’autre côté. Et ça faut surtout pas l’oublier.
Je me souviens d’un alpiniste qui m’avait dit un jour « l’Everest est le sommet le plus dangereux du monde par ce que souvent les gens se trompent d’objectif. Leur objectif est d’aller escalader l’Everest et non pas de redescendre. et du coup c’est ce qui fait que les gens, enfin ya pas mal d’alpinistes qui font les quelques mètres en trop qui les relient au sommet et qui leur coûte la vie ».
Et donc il faut jamais oublier ça quand on fait un sport, ou qu’on utilise les éléments qui sont sont plus forts que nous, que ce soit en montagne ou en mer, notre objectif faut pas oublier c’est toujours d’arriver entier. Ce qui fait qu’un bon marin est capable de s’arrêter au port avant même qu’il ait de vrais problèmes.
Donc du coup ça je pense que c’est est hyper important d’avoir bien ça en tête avant le départ, l’objectif en croisière c’est d’arriver avec tout le monde à bord en bon état, si possible sans avoir traumatisé qui que se soit.
Donc ça veut dire gérer le bateau de la manière adéquate, c’est-à-dire de prendre les ris quand il faut, pas se laisser dépasser, être en avance de phase par rapport aux éléments donc quand un front arrive on va prendre des ris en avance plutôt que de ce faire déborder par le bateau voilà.
Après en termes d’équipements de sécurité, il y a un truc qui est hyper important et en solitaire c’est le seul qui compte, c’est qu’il faut rester à l’intérieur des filières par ce que si tu passes de l’autre coté ben t’es mort et ce, même si t’as un gilet ou même si tu as une longe.
Donc ce qu’il faut c’est être toujours accroché au bateau ça c’est le truc qu’on nous apprend dès le début, il faut être accroché aux bateaux ça c’est indispensables à partir du moment ou on passe la tête par la descente, il faut être accroché et accroché court, surtout au centre du bateau c’est-à-dire que si tu t’accroches sur la filière, si tu arrives a passer par-dessus la filière, tu seras loin du bateau, tu pourras pas remonter.
C’est arrivé à un de mes copains quand même pendant la mini au départ lui il était accroché court. Il avait une double longe, il est passé par-dessus bord pendant un changement de voile et c’est le fait d’avoir une double longe et courte qui l’a sauvé parce qu’il s’est fait traîner à moitié sous le bateau pendants quelques mètres enfin quelques secondes quelques minutes je sais pas avant de pouvoir aller à l’arrière et puis ouvrir la bastaque ce qui a fait démâter son bateau, après il a du couler le bateau à moitié en le remplissant d’eau en ouvrant la trappe de sécu pour pouvoir remonter à bord. Il était incapable de remonter à bord tout seul.
Tout ça pour dire, sans vous effrayer que ça ne serait pas arrivé s’il s’était attaché court et surtout s’il avait décidé comme tous les solitaires de freiner avant de faire son changement de voile, plutôt que de le faire sur la route et quand le bateau saute, donc c’est un peut con, mais ça a failli lui couter la vie.
Donc l’objectif c’est toujours d’anticiper, de pas prendre de risque, en tout cas de mesurer les risques quand ya quelqu’un qui va faire une manœuvre, et ça d’ailleurs j’ai fait la mini, mais j’ai aussi traversé l’Atlantique sur le multi, le maxi trimaran Macif en 2017, sur The Bridge qu’on à remporté aussi et la les règles étaient très claires.
C’est un bateau qui va à 30 40 nœuds très facilement, mais la règle c’est que quand quelqu’un sort du cockpit on peut pas se permettre de le perdre voilà, donc du coup c’est « on ralentit » et la règle c’est « pas d’eau sur le pont du bateau ! ».
Donc il faut freiner le bateau, le mec qui est à la barre il a l’ordre de ralentir le bateau autant que possible, jusqu’à tant qu’il n’y ait plus d’eau sur le pont pour que les mecs sur le pont puissent faire la manœuvre rapidement et surtout en sécurité.
Donc j’insiste là-dessus, ce qui est important c’est de rester à bord et d’avoir un comportement marin qui fait prendre le moindre risque possible à ton équipage et pour toi même, sachant que si tu passes à l’eau que tu sois en solitaire ou en équipage t’as à peu près le même taux de chance d’être rattrapé, c’est- à-dire c’est à peu près zéro. Si t’es en équipage t’as une deuxième chance, mais elle est tellement petite…
Moi je me souviens très bien des briefings des pilotes de l’armée de l’air qui vont secourir les marins en mer, et ils nous ont passé des vidéos de sauvetage ou on voit juste pas les bateaux qui font 18 m démâtés, depuis l’avion on les voit pas, donc un mec dans l’eau on à aucune chance, enfin on à quasiment aucune chance de le retrouver quoi.
Donc désole de vous faire un peut flipper là-dessus, mais bon ce que je veux dire c’est que c’est vraiment hyper important de s’accrocher au centre du bateau avec une longue qui est assez courte pour ne pas passer de l’autre côté de la filière premièrement, et puis mettre un gilet, ça peut sauver si on tombe à l’eau.
La nuit typiquement moi j’ai toujours mon gilet, même si je suis en équipage c’est une règle que j’ai à partir du moment ou je suis hors de l’intérieur du bateau, j’ai toujours mon gilet et puis comme ça si jamais je me fais bousculer par une bôme ou un truc comme ça et que je suis inconscient j’ai quand même une deuxième chance.
Et puis après ya un truc qui peut être pas mal pour justement avoir une deuxième chance c’est d’avoir une PLB, une “Personal Location Beacon” ou un truc comme ça. C’est une petite balise personnelle AIS qui permet aux bateaux de retrouver ceux qui sont passés à l’eau en suivant sa trace AIS.
Pour ça l’AIS est, moi je trouve, un super moyen de sécurité pour retrouver les mecs qui sont sont tombés à l’eau et par exemple. Malheureusement, le dernier naufragé… enfin y’en à un qui est tombé à l’eau sur la dernière Volvo Ocean race ils l’ont pas retrouvé parce que justement l’AIS du bateau était en panne et voilà ça sert juste à ça.
Je pense que s’ils avaient eu un AIS qui fonctionnait il aurait peut-être eu une deuxième chance. Donc voilà tout ça pour dire c’est des trucs qui valent pas beaucoup d’argent, mais qui peut sauver des vies, donc je pense que l’AIS fait partie du matériel de sécurité qui pour moi est indispensable à bord.
[Petite précision de notre part, car il faut bien faire la différence entre les deux systèmes qui existent.
La balise PLB (balises de localisation personnelle) du système COSPAS-SARSAT envoie l’information au satellite qui la transmet au centre de recherche à terre. Avec se système on est sûr que le signale est transmis/reçus, mais si l’homme tombé à la mer faisait pâtit d’un équipage ne disposant pas de moyen de communication avec le centre de recherche, ils auront beau être déjà sur zone ce ne sera pas utile, car ils ne seront pas ou chercher.
La balise AIS elle passe par les ondes VHF, et à un rayon de +/- 5milles nautiques (car un homme dans l’eau n’est pas très haut), mais par contre tous les navires à proximité de la balise ayant un récepteur AIS à bord verrons s’afficher sur l’écran de leur AIS qu’il y a une balise qui demande de l’aide.
Selon moi, le mieux c’est d’avoir les deux surtout lorsque l’on navigue loin des cotes.]
Mary & Anto :
Au niveau du matériel de rechange pendant les courses qu’est-ce que vous sélectionnez pour embarquer ce qu’il faut, sans en avoir de trop?
Benoît Marie :
Effectivement nous il faut qu’on soit le plus léger possible, et puis les budgets sont limités donc il faut souvent choisir. Ce qu’il faut c’est se poser la question de quel est le matériel vital dont j’ai besoin pour aller jusqu’au point d’arrivée dans de bonnes conditions.
Donc moi j’avais entre guillemets classés tout le matériel que j’ai à bord sur :
• 1 : ”vital”,
• 2 : ”ça serait quand même bien” et
• 3 : ”bon c’est optionnel”.
Donc typiquement tout ce qui est vital c’est tout ce qui me permet de passer une bonne traversée sans péter un plomb, donc tout ce qui est système de gouverne, c’est-à-dire : pilote automatique les capteurs qui vont dans la boucle de pilote automatique également, tout ce qui est drosse de barre ou lien avec les safrans. Et puis tout ce qui tient le mât ou la quille, ça typiquement c’est quelque chose ou moi je me suis interdit d’avoir le moindre doute là-dessus.
Donc même si ça coûtait cher et que j’avais pas le budget pour, j’ai sans réfléchir, j’ai changé mes palets qui tenaient la quille, j’ai changé mes axes de haubans qui tenaient mon mât, et j’avais un pilote automatique de spare [rechange] que j’avais testé avant à l’entraînement, et ça j’insiste là– dessus, car quand j’ai testé ça marchait pas, et j’me suis dit “ouais c’est un pilote de spare… c’est utile que si ça fonctionne !”.
Le seul truc que j’avais pas changé, c’était ce qui tenait les safrans, parce que j’avais vu le fabricant du bateau qui m’avait assuré que c’était la treizième version et donc elle était hyper solide que ça tenait le coup.
Et tient voilà, au deuxième jour de notre transat le truc à commencé à péter donc j’ai trouvé une manière de les réparer. C’était une cornière en carbone en U qui était délaminé donc elle était pas encore cassée, mais elle avait plus de tenue structurelle. Donc j’ai fait un brêlage avec des cordages pour l’éviter de se dandiner d’un bord sur l’autre et de reprendre sa rigidité pour éviter de casser.
Donc mon conseil c’est de vraiment identifier, faire une liste de tout ce qui est indispensable. Donc pour moi c’est tout ce qui est lié à la sécurité tout ce qui tient le gréement, tout ce qui tient la quille, l’étanchéité du bateau et puis le pilote automatique.
Si ça ça tient, on est à peu près sûr d’aller à l’endroit où on veut aller et puis après ce qui est aussi indispensable c’est la bouffe et l’eau. Ca à l’air tout con, mais moi sur le transat, j’avais pris une quantité de jours…
Je savais que la deuxième étape c’était 13 jours, j’avais pris en gros 14 jours ou 15 jours de “bonne bouffe” par ce que pour moi c’est important la “bonne bouffe”. Et après j’avais pris 4 à 6 jours de lyophilisé, donc pas bon et assez léger, mais par contre qui me permettrait de survivre.
Et pour l’eau pareil, j’avais pris le minimum d’eau possible, mais je me suis toujours gardé un stock en cas de démâtage que je puisse tenir quelques jours de plus que prévu. Donc même si j’étais plus rapide que les prévisions je consommé… je vidais les bidons d’eau que j’avais en trop pour la course, mais j’en garder quand même assez pour survivre en cas de démâtage.
Donc ça, c’est assez important, je pense, pour moi de bien savoir ce qui est indispensable à la survie et ce qui ne l’est pas.
Typiquement les pièces du moteur, pour moi c’est pas indispensable, par ce que un bateau à voile s’il a des voiles qui tiennent la route, on arrivera toujours à l’arrivée. Et puis au pire si les conditions ne sont pas bonnes pour rentrer dans le port parce qu’on à plus de moteurs on peut aussi attendre ou demander assistance au zodiac du port pour nous aider.
Nous en mini on avait pas de moteur donc on faisait des entré de port à la voile, ça nous apprend que le jour ou ya tempête on rentre pas dans notre place qui est trop petite et toute proche d’autres bateaux, mais on fait demi-tour et on va se poser dans un gros ponton ou ya pas de risque de casser le bateau ou cassés les autres.
Et puis on va demander l’aide à la capitainerie de se remettre à l’endroit où on doit être un peu plus tard. Donc tout ce qui est pièce de moteur c’est pas indispensable, même si c’est quand même agréable d’en avoir, et je pense que c’est à chacun de faire sa liste. C’est une manière assez simple de savoir ce qui est indispensable ou pas, tout ce qu’on a.
Mary & Anto :
Très bien, très bien, comme tu le rappelles c’est vrai que la sécurité est vraiment primordiale en mer. D’ailleurs ça passe aussi par les prévisions météorologiques puisqu’on est totalement tributaire des éléments en mer.
Qu’est-ce que tu conseilles à ce niveau-là, comment être sûr d’avoir un bon créneau météo avant de partir sur une navigation ?
Benoît Marie :
Effectivement, ça, c’est hyper important comme je l’ai dit “le meilleur marin c’est celui qui arrive à refuser, à dire non et à faire demi-tour.« .
Donc la première des choses avant de partir en mer c’est de ne pas avoir d’impératif premièrement, c’est-à-dire qu’allais déposer un équipier à un endroit précis, à une date précise, c’est le truc à pas faire; parce que c’est ce genre de comportement qui peut nous faire justement déroger à la règle du bon marin. C’est pas une bonne raison d’aller déposait quelqu’un à un endroit a une date précise si la mer est mauvaise faut juste pas y aller un point c’est tout.
Deuxièmement, comment préparer : ben ouais il fait regarder la météo regarder… en course nous on regarde la route la plus rapide. Mais avant de regarder la route la plus rapidement on s’assure que ce soit une route qui soit safe. C’est-à-dire qu’on va regarder s’il n’y a pas un coup de vent sur la route, du vent fort, de la mer aussi, il peut y avoir des vagues importantes.
Donc avant de prendre la mer, moi ce que je conseille aux plaisanciers comme aux régatiers d’ailleurs c’est de regarder… c’est déjà de faire son cailler des charges. C’est-à-dire : qu’est ce que j’attends de cette traversée, ça peut être une petite ou une grande traversée d’ailleurs, mais qu’est-ce que j’attends de cette traversée ?
Est-ce que c’est d’aller le plus vite possible à tout pris ? Dans ces cas la ouais si c’est en course on sera prêts à prend une route qui sera pas forcément la plus agréable.
Ou est-ce que au contraire c’est : j’men fou un peut du temps que je vais mettre, ce que je veux c’est passer un bon moment, ne pas faire trop de près, parce que je pense qu’on est tous d’accord, le prés c’est pas cool ! Donc dans ces cas-là faut être prêts à passer un peu plus de temps à l’endroit où on se trouve avant de partir. Et puis de choisir une fenêtre météo qui soit safe et qui nous limitent tout ce qui est désagréable.
Donc pour ça il faut se poser un peu les questions météo, aller regarder les différents sites météo et essayer de lire les cartes isobariques. En plus c’est assez rigolo je trouve quand on commence à comprendre ce qui ce passe dans le ciel, on se sent vachement plus en sécurité sur le bateau, et puis ça a un petit côté chaman qui est hyper sympa je trouve d’arriver à lire les nuages…
Mary & Anto :
Tu aurais une petite astuce de pro pour ceux qui planifient leur croisière au niveau du routage météo pour réaliser son propre routage météo ?
Benoît Marie :
Effectivement moi en préparation de la mini, et d’ailleurs aujourd’hui je l’utilise encore, j’ai utilisé que ça d’ailleurs sur la préparation de la mini j’utilise un petit logiciel qui s’appelle Squid comme le poulpe en anglais d’une compagnie qui s’appelle Great Circle, une compagnie belge et en fait.
C’est un petit logiciel qui est gratuit qui permet de faire de la météo, de télécharger les fichiers GRIB donc les fichiers météo… tout, de la photo satellite au fichier de vent en passant par les observations, ya tout ce qu’il faut là-dessus. On peut choisir les fichiers météo que l’on souhaite, les fichiers américain, anglais, français, voilà. Donc pour les experts on peut vraiment rentrer dans ce puits d’information qu’est ce logiciel.
Mais surtout ce que je trouve hyper intéressant en croisière autant qu’en convoyage ou en course c’est quelque chose que j’utilise beaucoup, c’est un petit outil s’appelle Best start, “meilleur départ” qui te donne ton temps de parcours en fonction de ton heure de départ.
Donc en gros tu lui dis : moi je veux partir entre… j’ai une plage de départ de à peu près je sais pas je vais dire une bêtise, de 4 jours et tu lui demandes de te faire un routage toutes heurs les pendant quatre jours.
Donc t’as un bateau qui part toutes les heurs pendants 4 jours, et lui il te trace ton temps de parcours en fonction de ton heure de départ.
Et ça, ça permet de voir quand il y a des sauts dans la courbe et tu peux aussi voir quel est le trajet qu’il va faire. Donc lui il te sort le routage qu’il te propose et ça ça te permet de voir à quel moment tu as des phénomènes météo qui te font changer de route.
Donc ça c’est intéressant pour typiquement optimiser si tu veux surtout pas faire de prés par exemple, ou si tu veux éviter la tempête. Tu peux aussi lui mettre ces petits paramètres, tu peux aussi lui mettre d’ailleurs de faire du moteur en dessous d’une certaine vitesse donc c’est vraiment optimisé pour les plaisanciers et ça, c’est un petit outil gratuit du coup, qui est hyper utile en croisière et c’est hyper facile à utiliser!
Et pour moi ça peut vous permettre de faire en sorte de passer de bons moments, à éviter faire du prés, à éviter du gros temps et que tout le monde soit content à bord en navigant dans les meilleures conditions.
Donc l’outil Best start de chez Squi.
Mary & Anto :
Pour en revenir à des sujets un peu moins effrayants que la sécurité, on va finir par tes projets à toi maintenant. Je sais que le confinement a changé la vie de beaucoup de marins et beaucoup de choses dans le genre, qu’en est-il pour toi ?
Benoît Marie :
Oui, effectivement je pense que le monde de la voile de compétition vivait des beaux jours jusqu’à en cette crise sanitaire, on va bien voir à quel point ce sera différent dans un futur proche ou à moyen terme. J’espère le moins possible différent.
Pour moi en fin de compte, j’ai décidé de travailler sur deux projets cette année uniquement, à la différence des années précédentes, on j’en avais quatre donc j’ai restreint le nombre de projets pour finir un truc qui me tient à coeur.
C’est-à-dire j’ai dessiné un bateau il y a deux ans et demi, un petit bateau de 3m35 cm qui en fait est un laboratoire de recherche sur les foils, ou on peut les bouger dans tous les sens.
Donc comme c’est des projets qui avancent l’hiver essentiellement, puisque l’été je suis sur mes circuits de courses, j’ai décider cette année de finir le projet et de me focaliser un peut là-dessus pour le finir et l’utiliser un maximum parce que c’est un bateau qui est techniquement hyper intéressant. Donc ça, ça rejoint mon premier amour de la technique, j’ai plein de trucs à apprendre de ce bateau là, et c’est des trucs qui vont me servir pour la course.
Donc de ce point de vue la ça m’impacte un peu moins que ce qui est des courses, du circuit de course internationale parce que c’est un bateau laboratoire.
Par contre, effectivement, sur le moth international, donc là c’est mon bateau de prédilection, les courses devaient commencer le 20 mai pour une saison avec plusieurs nationaux de plusieurs pays, puis des régates internationales en Italie, en Angleterre, jusqu’au Championnat du monde qui devait avoir lieu en septembre en Angleterre. On sait que les courses vont être plutôt reportées, la pour l’instant les courses sont reportées à août, septembre…
Mais pour l’instant avec un gros ? parce qu’on sait pas du tout dans quel état sera la planète, au niveau sanitaire, on ne sait pas comment seront les frontières. Donc aujourd’hui j’ai aucune idée de si je vais avoir une année sportive ou non sur ces circuits de courses, donc c’est un peu… ça fait aussi parti de la vie des marins d’improviser, donc voilà je continue à improviser tant que je peux, même si c’est pas très agréable.
Mary & Anto :
Merci beaucoup d’avoir répondu à toutes nos questions, ça nous a apporté beaucoup d’informations intéressantes, et bonne continuation à toi pour la suite, j’espère que tu pourras reprendre les courses d’ici pas trop longtemps et en attendant que ton projet se déroulera au mieux !
Benoît Marie :
Merci, c’est gentil. Bonne navigation à tous en tout cas et surtout prenez soin de vous et attachez- vous, le message de la fin.
Merci à Benoît Marie et merci à vous de nous avoir suivis !
S’il y a d’autres professionnelles de la voile qui vous intéresse, dites-le nous dans les commentaires, peut-être pourrons-nous les interviewer pour vous.
Et en attendant, retrouvez-nous sur le blog !